Radiohead signe un retour grandiose à Madrid : une scénographie immersive alliée à une setlist intemporelle

Nassim Pascotto

Nassim Pascotto

Actualisé le 5 novembre 2025 5/11/257 min.
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Quand Radiohead revient, c’est toujours un événement. Le 4 novembre 2025, le groupe britannique a inauguré sa tournée européenne 2025 au Movistar Arena de Madrid, marquant son premier concert complet depuis sept ans.
Le décor était à la hauteur de la légende : une scène centrale circulaire, entourée d’un mur LED panoramique enveloppant le public à 360°. Les cinq membres – Thom Yorke, Jonny Greenwood, Ed O’Brien, Colin Greenwood et Philip Selway – étaient installés au cœur de l’arène, donnant l’impression d’une proximité rare, presque rituelle.

Ce dispositif scénique, à la fois technologique et organique, a transformé la salle en un cocon lumineux, une expérience immersive où la musique et la lumière se répondaient.

Une setlist pensée comme un voyage temporel

Des morceaux rares et des classiques revisités

La setlist du premier soir à Madrid a surpris tout le monde. Le groupe a alterné titres emblématiques et pépites rarement jouées, offrant une traversée complète de son répertoire.

Les fans ont notamment eu droit à « Sit Down. Stand Up. », jouée pour la première fois depuis 2004, un retour inattendu à l’univers expérimental de Hail to the Thief. Les applaudissements qui ont suivi ont confirmé que le public attendait ce genre de moment depuis longtemps.

D’autres morceaux, plus familiers, ont soulevé la salle : « Subterranean Homesick Alien », issu de OK Computer, et « How to Disappear Completely », de Kid A, ont résonné comme des points d’émotion pure. Le groupe a su équilibrer nostalgie et surprise, un dosage dont il détient le secret.

Une soirée de contrastes

La setlist complète, composée d’une vingtaine de titres, mêlait des hymnes générationnels comme « Paranoid Android », « Karma Police » et « Fake Plastic Trees » à des titres plus abstraits comme « You and Whose Army? » ou « There There ».
Chaque chanson s’enchaînait avec fluidité, sans rupture visible, comme si tout le concert était conçu comme une seule œuvre.

Le choix d’ouvrir avec « Let Down » – morceau souvent absent des tournées passées – a immédiatement plongé la foule dans une atmosphère d’apesanteur.

Une mise en scène qui redéfinit le concert

Radiohead a toujours accordé une importance capitale à la scénographie, et cette tournée ne fait pas exception.
La scène centrale permettait au public d’observer chaque musicien de tous les angles ; le mur LED diffusait des motifs mouvants, des paysages abstraits et des effets de déformation visuelle, comme si la musique générait l’image.

Les lumières changeaient au rythme des crescendos : rouge profond sur « 2 + 2 = 5 », bleu éthéré sur « How to Disappear Completely », vert fluorescent pendant « Idioteque ».
L’expérience devenait presque synesthésique – voir le son, entendre la lumière.

Un groupe en état de grâce

Une interprétation précise et habitée

Malgré les années de silence, Radiohead a joué avec une cohésion intacte. Thom Yorke, visage concentré, voix aérienne, semblait totalement habité par ses textes. Jonny Greenwood, armé de guitares, synthétiseurs modulaires et Ondes Martenot, projetait des textures sonores d’une intensité cinématographique.
Ed O’Brien, quant à lui, assurait les harmonies vocales et les nappes atmosphériques.
Le tout soutenu par la basse nerveuse de Colin Greenwood et la frappe élégante mais implacable de Philip Selway.

Une émotion collective

Quand retentissent les premiers accords de « Karma Police », la salle entière chante. Le refrain, repris par 20 000 voix, suspend le temps. Puis « How to Disappear Completely » vient clore la soirée : un moment presque liturgique.
Les spectateurs, certains en larmes, savent qu’ils viennent d’assister à un retour à la hauteur du mythe.

Ce que cette tournée raconte

Une renaissance sans nouvel album

L’un des aspects les plus fascinants de ce retour est l’absence de nouveau disque. Le dernier album de Radiohead, A Moon Shaped Pool, date de 2016, mais le groupe a choisi de revenir sans nouvel enregistrement à défendre.
Cette liberté leur permet de revisiter leur répertoire sans contrainte, et de redonner vie à des morceaux oubliés ou rarement interprétés.

Un format tourné vers l’avenir

La tournée européenne 2025 ne cherche pas à reproduire le passé. Chaque concert adopte une setlist variable, un concept évoqué par Colin Greenwood : près de 70 morceaux sont prêts à être joués, et chaque soir aura sa propre couleur.
Cette flexibilité crée une expérience unique, impossible à reproduire, et rappelle que le groupe reste profondément attaché à l’expérimentation.

Radiohead, toujours à part

À une époque où les tournées pop reposent sur la surenchère et les effets spectaculaires, Radiohead continue de défendre une vision plus artistique du live.
Leur univers ne repose pas sur la nostalgie, mais sur la recherche de nouveaux angles, de nouvelles façons d’habiter leurs chansons.

Le concert de Madrid en est la démonstration : un dialogue entre le passé et le présent, la technologie et l’humain, la précision et l’émotion brute.

Et après Madrid ?

Le concert madrilène n’était que le premier d’une longue série : Bologne, Londres, Copenhague, Berlin et d’autres grandes villes accueilleront la suite de la tournée.
Les critiques évoquent déjà « l’un des retours les plus élégants et maîtrisés de l’histoire du rock alternatif ».
S’il ne s’accompagne pas (encore) d’un nouvel album, ce retour prouve que Radiohead reste un groupe essentiel, capable de surprendre sans se répéter.

En conclusion

Plus qu’un simple concert, le retour de Radiohead à Madrid ressemble à une déclaration d’intention : l’art du live peut encore être un espace d’émotion pure, d’innovation visuelle et de communion.
Les fans en ressortent bouleversés, les critiques conquis, et la scène musicale, elle, se souvient qu’un concert peut encore être un moment d’histoire.
Ce soir-là, Radiohead n’a pas seulement joué. Ils ont rappelé ce que signifie être un groupe vivant.


Sources

Écrit par

Nassim Pascotto

Nassim Pascotto

Rédacteur @Woodbrass