Depuis les années 60, les sonorités électroniques ont envahi la création musicale dans tous les styles, pour devenir aujourd’hui prépondérante dans la production actuelle et se décliner en une multitude de courants qui se mélangent allégrement les uns aux autres. Notre dossier « Le son électronique » se construit autour d’une sélection de 50 albums indispensables à écouter, une masterclass exclusive menée par le pionnier du genre Arnaud Rebotini, sans oublier notre sélection de matériel.
Si le rock puise ses sources et son développement dans l’électrification de la guitare, celles des « musiques électroniques » vont s’inscrire dans l’évolution des synthétiseurs, des échantillonneurs et autres boîtes à rythmes.
L’histoire de la synthèse sonore et de la lutherie électronique démarre à l’aube du XXe siècle, dès les années vingt, avec les expérimentations de quelques savants fous en blouse blanche comme le russe Lev Sergeyevich Termen inventeur du theremin, une machine monophonique contrôlée par la main et constituée d’un boîtier surplombé par deux antennes.
Le mellotron devient la première machine permettant de jouer à l’aide d’un clavier des sons préenregistrés sur une cassette. À cette période, les compositeurs contemporains imaginent aussi une autre façon de créer de la matière sonore en utilisant les nouvelles technologies naissantes à base de concepts mathématiques, de procédés électroniques, de numérisation informatique et de diffusion spatialisée, ouvrant la voie aux travaux de Iannis Xenakis, Pierre Schaeffer, Pierre Henry et autre Pierre Boulez.
Le synthétiseur tel qu’on l’entend aujourd’hui va naître en 1970 grâce à un visionnaire de génie, Robert Moog avec l’invention de son mythique synthé analogique monophonique, le Minimoog qui inondera les albums de l’époque. Il sera suivi par d’autres précurseurs comme le MS-20 de Korg et le Prophet-5 de Sequential Circuits, qui nous inspire une pensée pour Dave Smith, son concepteur, décédé le 31 mai.
Si les premiers échantillonneurs (sampleurs) débarquent au début des années 80, notamment avec la sortie du Fairlight CMI, cette décennie sera marquée par l’apparition de nouvelles synthèses numériques et du système MIDI informatique en 1983. De nouveaux constructeurs, d’origine notamment japonaise, Akai, Yamaha ou encore Roland, vont débarquer sur les étals offrant de nouveaux instruments plus abordables et initiateurs de nouveaux courants musicaux. Ainsi la house et la techno poseront leurs bases stylistiques sur le synthé monophonique Roland SH-101, la bassline TB-303 et la boîte à rythmes TR-808. Le mouvement hip-hop naissant s’attachera à l’utilisation de workstations comme la fameuse MPC60 d’Akai ou encore l’E-MU SP-1200. La new wave quant à elle se tournera vers de nouvelles sonorités synthétiques plus riches et complètes notamment par l’utilisation de la synthèse FM du Yamaha DX7.
Le son électronique va maintenant pouvoir se décliner et exister par lui-même. Les artistes disposent désormais de leur propre studio à la maison. Ils vont pouvoir composer leurs propres expérimentations musicales et créer de nouveaux courants : dub, big beat, ambient, drum’n’bass, breakbeat, électro house, french touch… Si le home-studio est le lieu propice à la création, les soirées DJ et live-set sont destinées à tester les créations des artistes devant un large public. Pour y répondre, cette décennie voit apparaître de nouvelles machines destinées au mix DJ comprenant des lecteurs CD et audionumériques, des consoles de mixage, des contrôleurs informatiques…
La puissance des ordinateurs, et le coût de plus en plus abordable de la mémoire et du stockage informatique, va permettre à de nombreux éditeurs de développer des applications et des logiciels de plus en plus pointus et complets. Et il y en aura pour tous les goûts et toutes les esthétiques : séquenceurs, sampleurs, instruments virtuels, effets, banques de sons…
Grâce à tous ces outils, qu’ils soient matériels ou logiciels, le son électronique s’est immiscé dans toutes les strates des esthétiques musicales offertes aujourd’hui à nos oreilles. Il a été distillé dans le jazz, la pop, le rock, la chanson, le hip-hop… mais aussi dans la musique classique, la musique traditionnelle, la musique de film… De nouveaux styles émergent tous les ans, de nouvelles fusions existent, et surtout le son électronique est devenu universel…
© Kraftwerk
Actif depuis la fin des années 90, Arnaud Rebotini est aussi connu sous le nom de Zend Avesta et pour son projet protéiforme Black Strobe. Orfèvre des synthétiseurs analogiques, il compose par exemple en 2008 l’album Music Components avec uniquement du matériel Roland (SH-101, JUNO-60, TR-808 et autres TB). En 2018, il reçoit le César de la meilleure musique originale de film pour 120 battements par minute.
En partenariat avec le magazine KR home-studio, il dispense une masterclass exclusive autour du son électronique.